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SOLAG - L'enrobage des semences

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L’enrobage des semences : une technique pour booster les plantes au démarrage ?

L’enrobage des semences semble une méthode intéressante pour améliorer la croissance des plantes dès leurs premières phases de développement. Le principe est d’envelopper les graines avec des éléments dits nutritifs et stimulants, pour accélérer leur germination et le début de leur développement. L’objectif est d’apporter un avantage à la culture de façon ciblée. :

  • Augmentation de la vigueur à la germination
  • Prospection racinaire plus importante sur les premiers stades de la plante
  • Pouvoir répulsif vis-à-vis des ravageurs
  • Augmentation de la résistance des graines à certaines maladies

Aujourd’hui des tests sont effectués chez des agriculteurs mais peu de référence ont été créés à ce sujet. Retour sur quelques essais.


Expérimentations et résultats

Résultats d'essais sur semences de lin

(Les cahiers de l’agro-écologie, 2021. Retour sur deux ans d’essais des fermes du réseau Agr’eau Adour-Garonne)

L’objectif était de trouver des ingrédients de provenance organique permettant d’augmenter la vi¬gueur du lin dès le début de son développement (temps de germination plus court, rapidité de développement et de recouvrement).

Contexte : Culture de lin bio cultivé en TCS. Sol argilo-calcaire assez superficiel à 1,6 % MO. 

Plan expérimental :

Résultats et interprétations :

Seule la 1ere modalité (sans mycorhize) a dépassé le témoin en rendement, de 41 kg/ha. En revanche, la deuxième modalité, avec mycorhizes en plus, obtient le rendement le plus faible. Deux explications plausibles :

  • L’hétérogénéité parcellaire constatée : salissement, réserve utile, état sanitaire des plantes différent au sein de la parcelle
  • Un cortège de micro-organismes particulièrement bénéfique naturellement présent dans le sol.. L’apport de mycorhizes exogènes a pu bouleverser le cortège ayant pour conséquence une baisse de rendement. 

Les enrobages sans mycorhizes augmentent les charges de 34€/ha et les revenus de 49€/ha, permettant d’obtenir une meilleure marge nette de + 15€/ha. 
Les mycorhizes représentent un coût additionnel de 34 %. 
Aux vues de ces premiers résultats, il semble difficile de rentabiliser le mélange avec ces mycorhizes. 
 

FIGURE :  Analyse économique de l’essai d’enrobage sec sur lin


Comparaison de plusieurs biostimulants en enrobage

(Les cahiers de l’agro-écologie, 2021. Retour sur deux ans d’essais des fermes du réseau Agr’eau Adour-Garonne)

Sur maïs en pot

Plan expérimental : Les 7 produits du tableau suivant ont été testés sur un maïs hybride bio demi-tardif. Chaque modalité a reçu 2,5 kg de produit par quintal de semence et toutes les modalités ont ensuite reçu le même traitement (ensoleillement et arrosage).

FIGURE :  Modalités des essais en pots d’enrobage sur semences de maïs.

AHAF : Acides Humique, Acides Fulvique
FPJ : Fermented Plant Juice. Ce produit est fabriqué en faisant « fermenter » des plantes avec du sucre brun. Le sucre fait exploser les cellules végétales par osmose et permet la libération des composés cellulaires. Au bout de 7 jours, dans des conditions de températures idéales (>25°C), la solution est filtrée et peut être appliquée en dilution à 1:500. 

Résultats et interprétations :

Bien qu’il n’y ait pas de différence statistiquement significative entre modalités, il semble que les Acides humiques et fulviques (AHAF) aient un effet positif sur le développement des plants. De plus, s’ils sont associés à des algues, l’effet semble amélioré car les écarts entre plants sont réduits ; autrement dit, l’association AHAF + algues permettrait d’homogénéiser la culture. Sur la modalité 3, deux plants ne sont pas nés et un troisième est mort à 4-5 feuilles. La place ainsi libérée a certainement profité aux plants survivants, c’est pourquoi nous ne tiendrons pas compte des bons résultats de cette modalité qui, a priori, a été impactée négativement à la germination.

Les autres modalités (Mélasse, FPJ Luzerne8, Mélasse + Auxines) obtiennent des résultats sensiblement proches de ceux du témoin non traité. Ces essais en pots nous apprennent qu’il est nécessaire d’évaluer les produits, les mélanges et leurs doses avant de se lancer dans des essais au champ à plus grande échelle. Ils nous ont permis de voir que certains enrobages organiques et notamment certains produits (Algues, Mélasse diluée, AHAF, Compost, etc.) ont des effets positifs sur la germination et le développement des jeunes plantules en condition semi-contrôlées. Attention cependant aux effets cocktails et à la réaction de la culture. 

FIGURE :  Evolution de la hauteur des plants de maïs au cours du temps en fonction des différentes modalités d’enrobage de biostimulants

Sur maïs au champ en enrobage

Plan expérimental : parcelle limono-argileuse profonde (Pyrénées) – 1,8 % de MO. 

Fertilisation : 5 t/ha de fientes et 260 kg/ha de 10-5-0 en localisé. 
Semis le 26 mai – 22 rangs à 60 cm d’écartement (densité prévue 100 000 gr/ha / +15% pour un meilleur écoulement lié à l’enrobage)
Enrobage : 1,5 L/q de maïs pour les produits liquides et 1,5 kg/q de maïs pour les produits solides, exceptée la modalité "Silifilm" qui a été mouillée à 2 L/q de semence. 8 enrobages différents ont été testés et comparés à un témoin non enrobé.

FIGURE :  Description des modalités de l’essai d’enrobages sur maïs au champ

► Résultats et interprétations :

Seules les modalités 1 et 9 sont statistiquement différentes. Les autres modalités appartiennent au même groupe statistique, et ne sont donc pas différentes. 

On remarque que seules les modalités 3 (Humivital), 9 (Humifirst + Algues) et 10 (TCO) ont des résultats supérieurs à la moyenne, bien que le test statistique ne valide pas formellement cette supériorité. Les écarts-types sont assez grands : on passe du simple au double pour certaines modalités et du simple au triple pour d’autres. Il existe donc une grande hétérogénéité au sein même de chaque modalité, excepté pour la modalité 10 (TCO) qui semble plus homogène.

FIGURE :  Nombre de grains par épi en fonction des modalités

Au champ en localisé dans la ligne de semis

► Plan expérimental : Parcelle limono-argileuse - 2,6 % de MO (sud du Gers) 

Semis direct sous couvert - 90 000 gr/ha - 40 cm d’écartement – 12/04
Récolte épis le 10/09
Variable mesurée : poids de l’épi / nombre de rangs /nombre de grains par rang

► Résultats et interprétations :

Pour le nombre de grains par épi et le poids par épi, on voit que le témoin-200UN surpasse toutes les modalités avec de gros épis réguliers. On observe également que 5 modalités (Chamae-500, TCO-200, TCO-400, Temoin-eau-200 et FPJ-400) font partie du même groupe statistique que le témoin.

Ces modalités de biostimulants, qui n’ont reçu aucune fertilisation, obtiennent des résultats très proches de ceux du témoin-200UN, mais avec une variabilité des résultats plus grande. Ce résultat, à la fois encourageant et très surprenant, peut s’expliquer par les 20 ans de SD pratiqués sur la parcelle, qui conduisent à une très grande fertilité naturelle des sols qui, associée aux biostimulants apportés, a permis de compenser la fertilisation azotée.

Nous pouvons également remarquer que les modalités temoin-0, FPJ-100 et FPJ-200, obtiennent des résultats statistiquement inférieurs au temoin-200UN. En revanche, il apparaît une évolution positive sur le FPJ où, en augmentant la dose, il semble que l’on augmente le nombre de grains par épi.

FIGURE :  Nombre de grains par épis en fonction de chaque modalité de biostimulants appliqués en localisé sur maïs.

Concernant le poids par épis, le temoin-200UN arrive en tête, mais fait partie du même groupe statistique que Chamae-500, TCO-200 et TCO-400. 
La programmation des épis de maïs a également été étudiée afin d’évaluer le potentiel de rendement des différentes modalités testées.

Pour chacune, la fréquence d’apparition des nombres de rangs est représentée sur le graphique ci-dessous. Il apparaît clairement que la modalité traitée au Chamae a un potentiel restreint avec de petits épis.

On peut noter également que les modalités temoin-200 UN et FPJ-400 ont un comportement relativement proche, avec un très fort potentiel où les plus petits épis comptent 14 rangs/épi. On peut observer également que pour les modalités TCO et FPJ, la dose améliore le potentiel. 
 

FIGURE : Poids des épis en fonction de chaque modalité

FIGURE : Fréquence du nombre de rangs par épi en fonction des modalités 

Enfin, en faisant une étude économique très simplifiée, on peut voir que les témoins non traités et traités à l’eau obtiennent les meilleures marges semi-brutes, mais restent loin derrière le témoin ayant reçu 200 UN. Cet essai révèle donc un potentiel agronomique des produits testés avec des résultats encourageants sur les composantes de rendement, mais leur coût ne permet pas encore d’obtenir de bons résultats économiques. 
 

FIGURE :  Rendement estimé (q/ha) et marge semi-brute (€/ha) pour chaque modalité de biostimulant appliqué en localisé sur maïs 


Témoignage

Jérémy BOHY : exploitant en ACS sur Mouilleron le Captif en Vendée

Pourquoi s’intéresser aux enrobages de semences ?

"Après avoir mis en place les leviers de l’ACS sur mon exploitation, j’avais envie d’aller plus loin dans ma démarche. L’objectif est la préservation du sol et sa fertilité. Par les couverts, le fumier des bovins et les broyats de déchets verts, je pense être sur la bonne voie pour le sol. Côté plante, je souhaite utiliser le moins de traitement possible notamment pour gérer les maladies. Je me suis renseigné sur cette notion d’enrobage avec des produits naturels afin de stimuler la plante au démarrage. C’est comme ça qu’est venu l’idée de tester sur les céréales dans un premier temps."

Qu’as-tu testé alors ?

"On a cherché quelques recettes avec notre conseiller ACS de la Chambre. On s’est dit qu’il fallait tester pour voir ce que ça donnait et un projet de recherche avait été déposé donc c’était aussi l’occasion d’acquérir quelques références.
On a testé dans un premier temps sur blé tendre avec un mélange à base de jus de lombricompost, d’acide humique et fulvique, d’algues, de bactéries et de champignons. Un prestataire nous fait cela en même temps que le triage donc c’est vraiment pratique. J’ai ensuite réalisé ce même enrobage sur mes semences de couvert, de méteils et de maïs."

Des résultats ?

"Les résultats du projet ne sont pas encore tous obtenus. Pour le moment, nous n’avons pas vu de différences quantitatives sur le rendement ni visuellement sur l’état des plantes. Il faudrait regarder au niveau des racines si on observe un développement plus important ou non mais ça reste un travail conséquent. J’ai trouvé quand même en réalisant des tests bêches que la structure était plus grumeleuse et moins lamellaire, ce qui doit être accentué aussi par les matières organiques que j’apporte régulièrement. Je continue à faire ces enrobages en remplacement des traitements de semences chimiques. C’est en quelque sorte une réassurance."

Conclusion

Les enrobages de semences peuvent améliorer les notions de vigueur de départ et la dynamique de levée des plantes cultivées. En fonction des espèces et des enrobages les processus peuvent être différents. Les conclusions semblent cependant être les mêmes à savoir que l’activation des processus de germination en amont du semis permettra d’accélérer la germination des plantes.

Pour ce qui est de la levée et du développement, plus la graine aura dans un entourage proche les éléments nutritifs favorables à sa croissance, plus elle aura de chance de s’enraciner et de produire de la biomasse.

Il existe différents points pouvant participer à améliorer la vigueur de départs, la fertilisation localisée, le PMG, l’hydropriming …

De nombreuses pistes sont encore à l’état de prospection mais la création dans le sol et sur les semences d’un environnement favorable au développement des plantes pourrait leur assurer une meilleure croissance.