Fonctions et fonctionnement de la prairie – nous parlons de cultures pérennes hors plantes annuelles (RGI).
La fertilisation azotée de cette culture, dont la destination fourragère est diverse (prélèvement direct par le pâturage ou indirect par la(les) fauche(s), se raisonne en tenant compte de plusieurs paramètres. Le calcul de l’équilibre de la fertilisation engage une réflexion à la parcelle. Ce calcul ne doit pas être systématisé tant les variables sont fortes.
Ce calcul de la balance azotée des prairies se réalise en amont des apports, mais doit se réajuster en fonction de l’année climatique et au fil des saisons (fin d’hiver, printemps, fin de printemps, automne).
Le sol :
On pense, à tort, que la connaissance du sol (par une analyse) suffira pour plusieurs campagnes. Or, nous constatons que le physique (texture) apporte des éléments stables, mais ce sont surtout les compartiments chimiques qui vont orienter les choix et décisions annuelles. La texture aidera à donner les capacités fonctionnelles (CEC, RFU, indice de battance, sensibilité au piétinement au compactage par les engins…).
Quel est le type de sol séchant, filtrant, hydromorphe très marqué, capacité de ressuyage lente, froid, tardif, drainé, hydro-séchant ?
Puis, on considère l’organisation des éléments organiques structurants le sol :
- MO (Matières organiques).
- Quelle teneur ? Sous prairies, il n’est pas rare de dépasser les 3 %, voire plus sur des prairies vieillissantes.
- Quel type de MO ? Facilement fractionnable, ou plus stable, plus riche en Carbone ? Attention, 5 % de MO ne préjuge pas d’un sol qui fonctionne bien. La MOC (matière organique stable, fortement carbonée) se fragmente lentement et libère peu d’éléments nutritifs dont l’azote. Les fournitures du sol en azote, par les matières organiques, sont donc variables et comprises entre 25 unités/ha et peuvent atteindre 150 unités par ha
Aération faible – compaction : ce sont souvent les causes identifiées du mauvais fonctionnement de la prairie.
Les racines sont peu actives, ne descendent pas suffisamment, n’explorent pas un grand volume de sol. Les conséquences : limitation dans la capacité du sol à minéraliser la MO, difficulté des racines à extraire l’eau et la solution du sol avec les minéraux et oligo éléments, et enfin, faiblesse de la plante qui devra puiser sur ses réserves pour assurer son continuum de développement et deviendra vulnérable.
Quelle est la destination de la prairie ?
En pâture :
- Quel type de pâturage ? Sévère, intensif ou plus « libéral » ? Les hauteurs d’herbe, entrée et sortie de parcelle, auront aussi, indirectement, un impact sur le rendement cyclique, le fonctionnement du sol, la capacité d’extraction racinaire, les espèces animales…
- Quel type racial de brouteurs ? Cela aura aussi un impact (ingestion, refus, déjections….).
- Quel rythme de pâturage ? Rythmes de pâturage lent (avec un retour tous les 20 jours) ou plus lent (retour supérieur à 25-30 jours) ?
Pâturage et contribution des déjections animales (restitution) : jusqu’à 40 unités/ha !
Effet de la conduite sur l’ingestion (Kg MS/ha)
Extrait du référentiel de la croissance de l’herbe – plaquette produite par le groupe prairies PDL (2012).
Fauche (précoce, tardive) : selon la conduite (déprimage – fauche tardive, fauche unique ou fauche et pâturage sur les regains), nous n’aurons pas non plus la même dynamique en besoin d’azote.
Composition botanique de la Prairie : de la graminée pure à la prairie complexe
Les graminées n’ont pas toutes (loin de là) la même capacité à produire un mat racinaire puissant et profond, capable d’explorer plusieurs horizons de sol. Les espèces les plus remarquables, comme la Fétuque élevée, le Dactyle aggloméré, peuvent explorer plusieurs dizaines de centimètres de sol (> 80 cm). Toutes les espèces ne répondent pas, en conditions limitantes, de la même façon aux apports d’azote (capacité à valoriser).
Les graminées sont généralement associées avec une ou plusieurs légumineuses (typée pâturage ou plus orientée fauche avec un port dressé). La contribution de celles-ci n’est pas négligeable pouvant aller jusqu’à l’équivalent de 100 unités d’azote.
Etat de la prairie
Couvert très dense, amoindri, déstructuré ?
Un couvert prairial se mesure avec la densité d’herbe produite sur un cycle exprimé en kg de matière sèche/cm/ha. Un couvert dense peut aller jusqu’à 300 kg de matière sèche par cm/ha, soit pour 6 cm d’herbe pâturée sur un cycle l’équivalent de 1.8 Tms/ha. Les faibles densités (<150 kg de MS/cm/ha) produisent donc moins de 1 tonne de MS à ingérer.
Le climat, la météo influence la croissance de l’herbe au fil des saisons
L’année 2021, atypique, avec une croissance faible lors de la période dite de pleine pousse, rappelle qu’il est important d’en tenir compte pour ajuster les apports d’azote. En 2021, il a fallu retarder les apports d’azote afin de les faire coïncider avec une période plus favorable à l’absorption des éléments par les espèces prairiales. En moyenne, seulement 2 tms/ha ont été produites, sur la première partie de printemps, et plus de 4 Tms/ha de mi-mai à fin juillet/début août.
Une prairie est une culture qui ne croît que si les conditions météorologiques lui sont favorables. Le potentiel productif annuel peut être déterminé en reliant les points précédemment cités (sol) avec le contexte pédoclimatique.
Dans un prochain article, nous évoquerons les règles de la balance azotées, le calcul du besoin en azote, les fournitures du sol, la gestion des apports, leurs fréquences, le fractionnement, les impasses possibles sur les apports.
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