C’est chez nos confrères vignerons helvètes que ce sont rendus 5 vignerons du 22 au 24 octobre 2024. Le groupe 30 000 (Ecophyto) a pu rencontrer 4 vignerons, 1 pépiniériste et 2 conseillers locaux de Genève à Fully (Valais) en passant par Neuchâtel et Lavaux (Vaud).
L’agronomie : pilier de la production
L’intérêt helvète pour maîtriser les couverts et limiter le travail du sol est vif. David MARCHAND, conseiller viticole au FiBL travaillent avec le Domaine CHAPPAZ à Fully sur un couvert de plantes relais composé de brôme, trèfle incarnat et luzerne lupuline, il précise : "l’objectif est de maintenir un sol couvert en permanence par la succession des cycles des plantes et re-semis naturels. Nous évitons ainsi de l’érosion et optimisons la fertilisation et l’utilisation de l’eau".
Sur les terrasses du Dézelay (Lavaux, Vaud), inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO, Luc DUBOULOZ et Doris SOMMER, du Clos des Abbayes (Ville de Lausanne), ont ancrés la couverture des sols dans leur itinéraire : "près des murs, il peut y avoir 10°C de plus, la vigne peut vraiment souffrir à ces endroits, les couverts participent à modérer cet impact sur le végétal et le sol". Dans ces zones en fortes pentes, sans herbicides, les domaines sont à la recherche du minimum de travail du sol sur les cavaillons. Didier ANCAY conseiller viticole chez CCD SAS irrigation et vigneron, teste l’implantation de fraisiers sur le cavaillon, "ils couvrent le sol assez rapidement grâce aux stolons et ont besoins de peu d’eau pour se développer". Marie Thérèse CHAPPAZ (Fully, Valais) recouvre certains cavaillons avec de la paille de blé : "cela prend du temps à installer mais je m’y retrouve dans la gestion des adventices, la gestion du stress hydrique, la stabilité et la fertilité du sol".
Au domaine Maison Carrée (Auvernier, Neuchâtel ; AB, biodynamie), les brebis pâturent dans les vignes une partie de l’hiver. Cela permet de "retarder" la pousse de l’herbe et donne plus de flexibilité sur les interventions du printemps. "Mais attention à ne pas laisser les brebis trop longtemps et/trop nombreuses sur une parcelle : elles mangent les bourgeons et mastiquent les bois !"
S’adapter pour mieux produire
Philippe BORIOLI, pépiniériste près de Neuchâtel nous indique que désormais, pour optimiser l’enracinement à la plantation, il "travaille avec des couverts entre arrachage et plantation, en évitant la charrue et les outils rotatifs car ils créés trop souvent des semelles". La pépinière, adhérente à l’association PIWI, développe des variétés résistantes au mildiou et à l’oïdium et "cette année, compliquée, nous avons traité au maximum 4 fois ces cépages avec un résultat très satisfaisant".
Avec le domaine Maison Carrée (Auvernier, Neuchâtel ; AB, biodynamie), les vignerons locaux traitent des groupes de parcelles pour plus de réactivité : les leurs et celles de leurs voisins. En plus du cuivre et du soufre, le domaine utilise "des extraits de plantes, élaborés par un prestataire local pour les vignerons locaux, et du lait cru écrémé à 8 l/ha". Ce dernier permet de diminuer les doses de cuivre avec une efficacité de 60-70 % les années à pression mildiou moyenne.
Chez Bernard BOSSEAU (Cave de Sézenove, Genève), qui a grandi dans les vignes du Pallet, nous rencontrons un stagiaire du lycée de Briacé : clin d’œil au vignoble de Nantes ! Ici, la transition est de mise vers plus d’agroécologie : "la pression sociétale est forte dans cette campagne urbaine". Le domaine supprime l’utilisation des produits de synthèse après la floraison et arrête progressivement les herbicides sur le cavaillon (pratiques encouragées par l’État).
Au Clos des Abbayes, près du Lac Léman, le domaine à fait le choix d’utiliser le drone plutôt que l’atomiseur à dos. La qualité de pulvérisation est équivalente à l’hélicoptère et nécessite donc un entretien particulièrement assidu de la vigne pour que les produits de contacts soient efficaces (viti AB) : ébourgeonnage, dédoublage, effeuillage, rognages et écimages anticipés, palissage organisé. La logistique d’approvisionnement en bouillie est similaire à la pulvérisation "à dos", mais en comparaison, les traitements sont moins fatiguant. Le domaine à gagner en bien-être et en flexibilité ! Dans les fortes pentes, pour donner plus de durabilité au travail, l’établissement des vignes en terrasses ou en banquettes permet la mécanisation. Ceci facilite la production mais aussi le recrutement de main d’œuvre et les reprises d’exploitation. Didier ANCAY, encourage ces façonnages pour maintenir une viticulture durable, minimiser l’érosion liée à l’activité viticole mais aussi mieux consommer l’eau : "ici l’eau coule des montagnes depuis toujours, mais avec l’évolution du climat et la fonte des glaciers cela n’est plus une évidence. La régulation de l’usage de l’eau va vite évoluer, notamment pour la viticulture, qui n’est pas considérée comme "essentielle"… ". Cela fait réagir l’assemblée...
Contacts
Contacts en Suisse :
- Conseillers locaux : FiBL, David MARCHAND ; CCD SA irrigation, Didier ANCAY
- Neuchâtel : Maison Carré, Jean-Denis PERROCHET (AB, biodynamie) ; Pépinière BORIOLI, Philippe BORIOLI
- Lavaux : Clos des Abbayes (AB), Luc DUBOULOZ et Doris SOMMER
- Fully : Domaine CHAPPAZ (AB, biodynamie), Marie-Thérèse CHAPPAZ
- Genève : Cave de Sézenove, Bertrand BOSSEAU
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